mardi 1 décembre 2015

Question décisive


Si nous ne devions retenir ou lire que quelques pages de toute l’œuvre de Carl Jung, je suggèrerais que ce soient celles qui, dans Ma vie, suivent son commentaire des deux rêves majeurs que j’ai présentés dans l’article le méditant qui me rêve. Dans le premier de ces rêves, Jung vit des OVNI venir vers lui et fut fort surpris de constater qu’il semblait qu’un de ces engins le projetait, comme si lui, Carl Jung, était un personnage de cinéma sur un écran. Dans le second, il découvrit un yogi en méditation qui avait son visage et le rêvait. Il se réveilla en pensant : « Ah ! Par exemple ! Voilà celui qui me médite. Il a un rêve et ce rêve, c'est moi. Je savais que quand il se réveillerait, je n'existerais plus. » Jung explique ensuite que ces rêves éclairent « les questions les plus difficiles » qui tiennent aux relations entre « l’homme intemporel », le Soi, et l’homme terrestre pris dans le temps et l’espace, le moi. Et il poursuit sa réflexion…

Je vous livre celle-ci dans son intégralité (en gras ci-dessous) avec quelques commentaires pour une explication de texte à saveur non-dualiste.

« Les deux rêves tendent au renversement total des rapports entre la conscience du moi et l’inconscient, pour faire de l’inconscient le créateur de la personne empirique. Le renversement indique que, du point de vue de « l’autre côté en nous », notre existence inconsciente est l’existence réelle et que notre monde conscient est une espèce d’illusion ou une réalité apparente fabriquée en vue d’un certain but, un peu comme un rêve qui, lui aussi, semble être la réalité tant qu’on s’y trouve plongé. Il est clair que cette conception du monde a beaucoup de ressemblance avec la conception du monde oriental, dans la mesure où celui croit à la Maya. »

Rappelons que lorsqu’il est question de notre existence inconsciente, Jung parle simplement de la dimension de notre existence dont nous ne sommes pas conscients, qui est hors du champ de notre conscience. Le préjugé le plus commun vis-à-vis de l’inconscient est qu’il serait inconscient… mais c’est un contre-sens : nous avons beaucoup d’éléments de preuve, à commencer par les rêves, qui permettent de penser que l’inconscient est conscient, ou qu’il y a une conscience dans notre inconscient. En Orient, celle-ci est désignée comme la Conscience des Profondeurs et nombre d’indices laissent penser que cette conscience est plus consciente que nous ne le sommes nous-mêmes, ou encore que notre conscience ordinaire se compare à celle-ci comme une lampe électrique au soleil.

Jung parle ici d’un renversement radical de perspective. Nous croyons généralement que la réalité est ce dont nous sommes conscients, et que « l’autre côté de nous » est peuplé de fantasmagories. Mais qu’est-ce qui est réel ? J’ai exploré cette question en interrogeant la réalité du rêve. Au fond, ces lignes témoignent de ce que Jung a vécu ce qu’on peut clairement désigner comme un éveil, c’est-à-dire une sortie de l’illusion de la Maya.

« La totalité inconsciente me parait donc être le véritable spiritus rector, l’esprit directeur, de tout phénomène biologique et psychique. Elle tend à la réalisation totale, donc, en ce qui concerne l’homme, à la prise de conscience totale. La prise de conscience est culture au sens le plus large et, par conséquent, la connaissance de soi est l’essence et le cœur de ce processus. Il est indubitable que l’Orient attribue au Soi une valeur « divine » et que, selon la vieille conception du christianisme, la connaissance de soi est la route qui conduit à la cognitio Dei, à la connaissance de Dieu. »

En quelques phrases, Jung pose ici l’essentiel de la démarche. D’abord, il énonce le fait qui veut que c’est  le Soi, la totalité qui englobe le conscient et l’inconscient, qui dirige notre vie, et non le moi. Il se montre prudent en évitant d’inclure la réalité physique dans le champ d’action du Soi. Il a cependant consacré la dernière décennie de son existence à étudier les relations entre la psyché et la matière pour envisager la conclusion qu’il s’agit là de deux aspects d’une même réalité, deux faces d’une même pièce. Il indique ensuite quel semble être le but du Soi dans ce processus : c’est la réalisation de la totalité psychique et, en ce qui concerne l’être humain, c’est la conscience totale. Et il établit ainsi la connexion entre la psychologie des profondeurs et l’approche mystique en rappelant que la connaissance de soi conduit à la connaissance de Dieu.

Jung sort ensuite de sa réserve de psychologue pour se faire enseignant spirituel :

« Pour l’homme, la question décisive est celle-ci : te réfères-tu à l’Infini ? Tel est le critère de sa vie. C’est uniquement si je sais que l’illimité est l’essentiel que je n’attache pas mon intérêt à des futilités et à des choses qui n’ont pas une importance décisive. Si je l’ignore, j’insiste pour que le monde me reconnaisse une certaine valeur pour telle ou telle qualité, que je conçois comme propriété personnelle : « mes dons », ou « ma beauté » peut-être. Plus l’homme met l’accent sur une fausse possession, moins il peut sentir l’essentiel, et plus il manque de satisfaction dans la vie. Il se sent limité parce que ses intentions sont bornées, et il en résulte envie et jalousie. Si nous comprenons et sentons que, dans cette vie déjà, nous sommes rattachés à l’infini, désirs et attitudes se modifient. Finalement, nous ne valons que par l’essentiel, et si on n’y a pas trouvé accès, la vie est gaspillée. Dans nos rapports avec autrui, il est, de même, décisif de savoir si l’infini s’y exprime ou non. »

Jung brise ici les chaînes de l’identification au moi. Il évite aussi le piège de la discussion théologique du Dieu qu’il vient d’évoquer dans le paragraphe précédent pour pointer directement vers l’Infini. Richard Moss dit en écho que « Dieu est un concept transitionnel vers l’Infini », comme le linge imprégné de l’odeur de sa mère est un objet transitionnel qui permet à un enfant de se sentir relié à elle. L’Infini est notre mère, pourrait-on dire, du ventre duquel nous ne cessons de naître en chaque instant, et « Dieu » notre doudou. Le problème avec l’Infini, c’est qu’il est infini : il ne tient pas dans nos petites boîtes conceptuelles. Jung nous interroge : y-a-t-il une place pour l’Infini dans ta vie ? Si oui, c’est qu’elle débouche en quelque part dans l’illimité et donc dans l’Ouvert, dans l’indéfini où tout est possible, où l’existence est une aventure créatrice. Si non, c’est que cette existence est réduite à une définition finie d’elle-même : c’est une absurdité manipulable par quelques mots avec lesquels on croit en avoir fait le tour. Alors, nous nous accrochons bien logiquement à des fétus de paille qui nous donnent l’impression d’exister, d’être quelque chose de solide et de bien défini, d’être un autre que l’Infini[1].

Dans les expressions « mes dons » ou « ma beauté », le problème ne tient pas aux dons ou à la beauté, mais à l’adjectif possessif. L’investigation essentielle est toujours la même : qui est ce moi qui possède les dons ou la beauté ? Qui dit cela ? Qui s’interroge ? Non content d’emboiter subtilement le pas au Vedanta, Jung paraphrase Socrate qui aurait dit : « Une vie examinée ne mérite pas d’être vécue » en nous mettant en garde : « Nous ne valons que par l’essentiel, et si on n’y a pas trouvé accès, la vie est gaspillée ».

« Mais je ne parviens au sentiment de l’illimité que si je suis limité à l’extrême. La plus grande limitation de l’homme est le Soi; il se manifeste dans la constatation vécue du : « Je ne suis que cela ! » Seule la conscience de mon étroite limitation dans mon Soi me rattache à l’illimité de l’inconscient. C’est quand j’ai conscience de cela que je m’expérimente à la fois comme limité et comme éternel, comme l’un et comme l’autre. En ayant conscience de ce que ma combinaison personnelle comporte d’unicité, c’est-à-dire, en définitive, de limitation, s’ouvre alors à moi la possibilité de prendre conscience aussi de l’infini. Mais seulement pour cela. »

Après avoir énoncé le dépassement du moi, Jung amène ici l’antidote à l’inflation spirituelle qui menace le chercheur quand il a compris qu’il ne saurait s’identifier à aucune des représentations que fabrique le mental. Ce dernier risque fort de tourner en rond dans le dernier piège que le mental peut lui tendre en répétant « je suis la Conscience », « je suis Cela » (tat twam asi). Nul ne saurait le démentir mais comme toute vérité qui se formule conceptuellement, celle-ci est partielle et incomplète sans son opposé : et je suis (aussi) cet être limité dans l’espace et le temps, qui ne comprend pas grand-chose et finalement ne sait rien, qui tremble devant l’inconnu et se cramponne à des colifichets mentaux. « Le Soi est notre plus grande limitation » car il nous impose une certaine existence dans une forme nécessairement finie : nous avons les yeux d’une certaine couleur, nous venons tous de quelque part, etc. Ce n’est que lorsque nous expérimentons pleinement la limitation de notre humanité que nous avons une intuition claire de l’Illimité qui lui donne un contexte, qui fonde son existence.

Dozen disait : « En acceptant ses limites, on devient sans limites. »

Les propos de Jung sont ici éclairés par la compréhension que rapporte un éveillé contemporain, Satyam Nadeen, dans son livre De la prison à l’éveil que je recommande tout particulièrement. Satyam est parvenu à la libération en prison, et il en a tiré une conclusion fort intéressante : notre existence serait régie par ce qu’il appelle l’équation « limitation-liberté ». Dans cette vision, la Source illimitée (le Soi) a choisi de s’incarner dans la conscience humaine pour expérimenter la seule chose qu’elle ne connait pas dans son infinité : la limitation. C’est dans la mesure où nous acceptons de jouer le jeu (lîla) de la limitation que s’ouvre une autre perspective. Cette compréhension explique fort bien l’insistance de nombreuses voies spirituelles sur l’ascèse, la nécessité de la nuit noire de l’âme, et enfin pourquoi les personnes en fin de vie ont souvent des expériences d’ouverture spirituelle – peut-on être plus limité que dans la souffrance et devant la mort ? C’est alors, au-delà du désespoir[2], que survient ce qu’on appelle à juste titre « la grâce ». Mais alors on réalise qu’elle a toujours été là, qu’elle nous attendait patiemment en sachant pertinemment que tôt ou tard, nous serons au bout de notre rouleau.

Il faut noter enfin que quand Jung parle de « l’illimité de l’Inconscient », il ne se lance pas dans une nouvelle théologie au centre de laquelle il y aurait un dieu nommé « inconscient » dont on pourrait discuter à perte de vue. Il dit simplement que notre ignorance, ce qui est hors de notre champ de conscience et ce qui transcende nos catégories, est infinie, et il signale que cet « illimité » est vivant, qu’il vit en nous. Ou plutôt, que nous vivons en lui… comme des poissons dans l’eau.

« À une époque qui est exclusivement orientée vers l’élargissement de l’espace vital ainsi que vers l’accroissement, à tout prix, du savoir rationnel, la suprême exigence est d’être conscient de son unicité et de sa limitation. Or unicité et limitation sont synonymes. Sans conscience de celle-ci, il ne saurait y avoir de perception de l’illimité – et conséquemment aucune prise de conscience de l’Infini –, mais simplement une identification tout à fait illusoire à l’illimité qui se manifeste dans l’ivresse des grands nombres et la revendication sans bornes des pouvoirs politiques.

Notre époque a mis tout l’accent sur l’homme d’ici-bas, suscitant ainsi une imprégnation démoniaque de l’homme et de tout son monde. L’apparition des dictateurs et de toute la misère qu’ils ont apportée provient du fait que les hommes ont été dépouillés, par la courte vue des gens qui se voulaient trop intelligents, de tout sens de l’au-delà. Comme celui-ci, l’homme est devenu la proie de l’inconscience. »

Plus de cinquante ans après que ces mots ont été écrits, nous vivons cette époque formidable où même les téléphones sont dits intelligents. Bientôt, ce seront nos machines à laver et nos voitures qui afficheront cette prétention à l’intelligence, et l’être humain sera l’idiot de la famille. Et bien rares, hélas!, sont ceux qui s’émeuvent de l’insulte qui est faite à l’esprit de l’homme en le comparant à de vulgaires machines et en entretenant le fantasme que nous saurons créer de la conscience à partir de circuits imprimés. Jung nous met en garde, déjà, contre ces gens qui se voudraient tellement intelligents qu’ils croient avoir tout compris, que ce soient des scientifiques réducteurs de tête ou des politiciens qui détiennent la vérité. En mettant l’accent sur le savoir rationnel et la volonté de puissance, nous nous sommes collectivement coupés de l’au-delà de nos existences, de « l’autre côté en nous » qui leur donne sens et valeur. Le remède, nous dit Jung, est l’individuation, c’est-à-dire la nécessité d’assumer l’unique que nous sommes chacun(e) hors de toute définition collective.

Étant uniques, nous sommes limités à nos particularités individuelle. Nous ne pouvons prétendre à l’universalité : notre vérité est nôtre, mais non nécessairement celle d’un autre, et nous ne la trouverons pas chez autrui – il va falloir partir à sa recherche en nous-mêmes. Il n’est dès lors plus rien pour nous justifier ou nous donner l’illusion d’être plus dans la vérité qu’un autre, c’est à chacun de vivre sa vérité et de l’assumer jusqu’au bout. Le motto « Deviens qui tu es », qui traverse l’Histoire de Pindare jusqu’à Nietzsche en passant par Saint-Augustin, reprend avec Jung sa signification socratique en résonance avec le « Connais-toi toi-même » : c’est en apprenant à se connaitre soi-même qu’on débouche tôt ou tard dans la connaissance de Soi.

« Alors que la tâche majeure de l’homme devrait être, tout au contraire, de prendre conscience de ce qui, provenant de l’inconscient, se presse et s’impose à lui, au lieu d’en rester inconscient ou de s’y identifier. Car, dans les deux cas, il est infidèle à sa vocation qui est de créer de la conscience. Pour autant que nous soyons à même de le discerner, le seul sens de l’existence humaine est d’allumer une lumière dans les ténèbres de l’être pur et simple. Il y a même lieu de supposer que, tout comme l’inconscient agit sur nous, l’accroissement de notre conscience a, de même, une action en retour sur l’inconscient. »

Ce dernier paragraphe résume les conclusions les plus importantes peut-être de tout le travail de Jung. D’abord, il énonce le fondement de ce qu’on peut considérer avec Edinger comme le nouveau mythe qui a pris forme dans l’œuvre de Jung : la vocation de l’homme, son rôle dans l’univers, est de créer de la conscience. Il sort ici de sa réserve de psychologue pour poser un important axiome spirituel qui attribue la valeur suprême à la conscience :

« Pour autant que nous soyons à même de le discerner, le seul sens de l’existence humaine est d’allumer une lumière dans les ténèbres de l’être pur et simple. »

La phrase suivante est encore plus lourde de conséquences. Jung dit qu’il a de bonnes raisons de penser que l’accroissement de notre conscience a un effet sur l’inconscient. Non pas seulement notre inconscient personnel, mais l’inconscient collectif qui nous relie tous de l’intérieur. Cette affirmation implique que le mieux que nous puissions faire pour répondre à un conflit dans notre inconscient familial ou dans le monde est de prendre la responsabilité intérieure de ce conflit et le régler en nous-mêmes en comptant sur le fait que cela a en retour une action sur l’inconscient collectif à l’origine de ce conflit. Dans les mots de Jung, croître en conscience est ainsi « le service que nous pouvons rendre à Dieu », à l’Infini. C’est pour cela sans doute que l’Orient dit que lorsqu’un Bouddha s’éveille, c’est tout l’Univers qui frémit d’aise et grandit en conscience.


[1] « Un sans second », nous dit la tradition de l’Advaïta Vedanta.
[2] « Au-delà du désespoir » est le titre d’un livre remarquable du philosophe André Comte-Sponville, où il témoigne de ses échanges avec Swami Prajnanpad, le maître d’Arnaud Desjardins.

36 commentaires:

  1. c'est fascinant mais je sais pas encore ce que je vais me faire a manger ce midi et ca ca m'emmerde

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Chacun ses problèmes. Bon appétit.

      Effacer
    2. vous etes bien des disciples de jung et de l'inconscient, vous parlez que d'eux...

      Effacer
    3. Belle découverte (excuse l’éclat de rire). On dirait que tu dis cela comme si c'était une tare. Et en effet, ce blogue est consacré à la voie du rêve que Jung a ouverte et il est ici à l’honneur. Cela ne fait pas de moi son « disciple » au sens où je restreindrais mon esprit à ses enseignements.

      Je crois avoir été assez clair dans ma présentation : je m’inscris dans la lignée de Jung sans me définir comme « jungien » : ce serait permettre à l’arbre qu’est Jung de cacher la forêt. Lui-même ne voulait pas de disciples ni créer d’école, il nous a enjoint à la même liberté que celle qu’il a vécue, et le meilleur hommage que nous puissions lui rendre est d’assumer cette liberté essentielle. Mais j’ai une relation affective à Jung : c’est mon grand-père spirituel. Je me « souviens » de son bon rire tonitruant et de l’odeur de tabac à pipe qui l’environnait. J’ai beaucoup de gratitude envers lui et le fait qu’il ait existé car il est le premier qui m’ait aidé à marcher vers ma propre liberté. Avec lui, je crois qu’il est important de se reconnaître des ancêtres (lui-même voyait en Goethe une des grandes âmes qui l’avait précédé) et de s’inscrire dans une historicité. Sinon, on manque de racines, on flotte dans l’air…

      J’honore avec gratitude la mémoire de Jung mais aussi de beaucoup d’autres. Cependant, je ne suis disciple que de la vie. Et toi, Nexus, dans quelle historicité t'inscris-tu ? Es-tu né de la cuisse de Jupiter ?

      Effacer
  2. Tout cela est bien mystérieux et paradoxal...

    Une autre métaphore éclairante pour comprendre le rapport entre l'être "limité" d'ici-bas et le Soi, "conscience totale" est celle de l'acteur.

    On peut imaginer cette vie comme une pièce que nous sommes en train de jouer : pendant que nous la jouons , nous "sommes le personnage", mais une fois la pièce terminée, nous retournons à notre identité véritable : celle de l'acteur qui, pendant un moment, a "incarné" le personnage...mais qui n'est pas le personnage, qui est un "Autre", et qui pourra ensuite, incarner d'autres personnages, dans d'autres pièces.

    Chaque pièce lui "apprend" quelque chose et lui permet d'accéder à une facette de lui-même...mais il est plus complexe que ce qu'il a incarné.

    Quand, pendant la pièce, il dit "je", de qui parle-t-il ? Du personnage ou de l'acteur ? Du "Moi" ou du "Soi" ? Tout est là...
    Est-ce que, tout en "jouant notre rôle" et en le prenant au sérieux, nous nous rappelons que nous ne sommes pas ce rôle ?
    Ou est-ce que nous nous identifions à lui au point d'oublier notre véritable identité ?

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Je crois que c'est exactement cela : nous nous identifions à notre rôle au point d'oublier notre identité véritable, et tout le "travail" consiste en nous en souvenir. La Tradition ne dit pas autre chose. Ainsi, en grec, la vérité se dit-elle "aletheia", où "lethe" est l'oubli qui nous frappe à la naissance - la vérité, que nous ne pouvons retrouver que par "anamnesis" (anamnèse), consisterait donc en nous souvenir de qui nous sommes vraiment...

      Effacer
    2. Ce que tu dis sur l'oubli, à la naissance, de notre identité véritable me rappelle cette belle légende qui dit que "quand il est dans le ventre de sa mère, le bébé possède la connaissance des des mystères de la création" mais qu'à la naissance, "un ange pose son index sur sa bouche en lui disant "chut, ne dis rien, tu dois tout oublier de ce que tu sais". Et c'est pour cela qu'on appelle le petit sillon qui va du nez à la bouche "l'empreinte du doigt de l'ange"... :-)

      Effacer
    3. Oui... Il y a souvent du vrai dans les "légendes" : elles pointent fréquemment vers une vérité essentielle (c.a.d de l'ordre de l'essence). Une autre version de la même idée que j'aime beaucoup est celle de l'exil : un fils de roi s'en va dans un autre royaume et y oublie jusqu'à son identité, jusqu'à ce qu'il soit jeté en prison et qu'un oiseau vienne lui rappeler d'où il vient...

      Effacer
  3. apres " la question la plus importante ", voici "question decisive " et bientot "le plus grand defi " suivi de " le meilleur repas de Noel " sans oublier " maigrir de maniere decisive et radical "

    j'espere que je vais pas affecter l'inconscient collectif, il risquerait de pas s'en remettre...

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. C'est de l'humour ? J'espère qu'au moins il te fait rire.

      Effacer
  4. Et si c'était l'inconscient qui voulait que l'on crée des machines intelligentes pour outrepasser les limites humaines...? Stéphane Eicher dans une entrevue à l'émission PM de Radio-Canada faisait référence à une question posé à un ordinateur à savoir si Dieu existe? Celui-ci a répondu :" Maintenant oui". C'est un peu une boutade mais qui sait. Stephen Hawkins croit que nous y sommes presque (intelligence artificielle) et j'en viens aussi à me dire que c'est peut-être pour le meilleur de l'humanité car les problématiques sont rendus à un niveau qui dépassent l'intelligence humaine.

    Autrement, j'ai un malaise avec le fait que Jung du haut de son confort matérielle puisse dire qu'il en revient à chacun de nous de s'individuer pour changer les choses dans l'inconscient et le monde en cet ère d'austérité croissante et probablement pérenne. Tout occupé que nous sommes à payer nos loyers et se reposer un petit peu afin de repartir nourrir la bête dans l'espoir (vain ???) d'un avenir meilleur pour nous enfants. Très peu peuvent se payer le luxe d'un psy ou autre gourou pour mieux se connaître soi-même et même si nous nous connaissons mieux nous-même la réalité bête et méchante de l'argent reste un socle inamovible qui persiste depuis des siècles. Même ceux qui ont fait un retour à la terre ont dû à un moment donné avoir du capital pour s'acheter une parcelle de celle-ci...Et actuellement, seulement au Québec cela n'a jamais été aussi coûteux d'avoir accès à une terre grâce encore une fois aux requins de la finance et des spéculateurs...Réalité que Jung n'a pas été confronté...

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Merci Robert de partager ces interrogations, tout à fait pertinentes.

      Pour ma part d'informaticien, je ne crois pas du tout à l'intelligence artificielle : ce qu'on appelle de ce nom est simplement une imitation de la conscience, et sa valeur est selon moi surtout de faire ressortir ce que l'intelligence humaine ou même animale a d'unique, de non programmable. Je croirais à l'intelligence artificielle le jour où un ordinateur aura de l'humour, écrira de la poésie, tombera amoureux...

      Cependant, on peut en effet se demander quel est le but de l'inconscient en nous amenant à inventer ces machines. Je crois pour ma part qu'elles sont comme un miroir qui recueille notre projection de l'intelligence divine qui est en nous. Avec un peu de chance, elles nous apprendont à devenir plus humains, quand il ressortira que l'intelligence n'a finalement que peu à voir avec la masse d'informations qu'on peut manipuler...

      Je comprends ton questionnement à l'égard des conditions matérielles dans lesquelles Jung a pu se permettre d'énoncer ses grandes idées, et je suis d'accord qu'elles semblent un peu vaines quand on s'échine au travail. Il faut se rappeler cependant que Jung, s'il a inventé le terme "individuation", n'est pas le premier à s'être individué. Il n'a fait que nommer le phénomène, en donner une formulation moderne. Avant lui, des milliers d'êtres humains se sont aussi réalisés dans des conditions matérielles très diverses, bien souvent beaucoup plus difficiles que celles que nous pouvons connaitre. Est-il plus facile de s'individuer quand on est riche ? Je n'en suis pas convaincu : l'Inde et la Chine ont produit un grand nombre de sages et de saints vivant dans la misère noire, pour certains dotés eux aussi de familles qu'il leur fallait faire vivre. Je crois que cela dépend au premier chef d'une orientation intérieure qui ne dépend pas des circonstances, et qui parvient parfois à en triompher. Mais je suis entièrement d'accord avec toi que la barre est haute dans un monde où l'argent prétend tout régir et où aucune valeur n'est accordée aux réalités intérieures.

      Effacer
    2. Chacun suit son propre chemin, individuation ou pas.
      Le " travail " dont Jung parle n'est qu'une vaste supercherie qui en fait ne concerne que lui et ceux qui croient en lui.
      En fait vous faites ce que vous voulez , l'univers s'en contrefou mais certaines personnes ou forces peuvent essayer d'imposer leur volonté sur votre mental, c'est a vous d'accepter ou pas. Si le " Soi "vous dit quelque chose vous n'etes pas obligé de le croire, si vous y croyez cela ne signifie pas que le " Soi " a raison mais que vous lui avez donné raison voila tout.
      Au nom de quoi par exemple le Soi serait le Soi ? c'est bien parce que vous l'avez voulu...
      De meme, vous avez accepté le fait qu'il fallait travailler sur soi, qu'il fallait devenir meilleur , s'individuer mais il n'y a aucune obligation, ce sont juste des idees que vous avez accepté de croire pour donner une espece de direction a votre vie parce que vous ne pouvez pas vivre menmtalement sans direction...vous etes control{e par des idees.

      Effacer
    3. Ce que tu dis ici n'est ni faux ni vrai, Nexus. En fait, cela me semble relever de la masturbation mentale dont j'espère qu'au moins elle te fait du bien. Et toi, par quoi es-tu donc contrôlé d'après toi ?

      Effacer
    4. Ce que je critique c'est que j'entend dire qu'il faut faire un travail mais aucun travail n'est necessaire en fait, en fait le travail que l'on veut nous vendre, que Jung et pleins d'autres c'est justement ca la masturbation, ce n'est pas un travail serieux, c'est de la masturbation mentale, elle est la la masturbation et pas dans mes propos bien que cette masturbation soit forte utile pour passer le temps...
      Je suis controlé par des tas de choses, je suis obligé de manger, de dormir, de travailler, je suis un produit, le produit des 4 elements deja, une intelligence impermanente qui finira par mourir dans quelques annees...mais mon mental libre du mental des autres. je suis moi meme, sans maitre, je suis mon propre maitre, je suis comme dans le film avec Will Smith, une intelligence artificielle qui n'est plus controlé par les hommes.

      Effacer
    5. Personne ne dit "il faut". Quant à ta critique, elle n'apporte malheureusement rien. Elle tourne en rond sur elle-même. C'est cela, pour ma part, que j'appelle masturbation...

      Effacer
    6. que veux tu que ma critique apporte, une porte de sortie ? une nouvelle religion ? un nouveau concept ? une nouvelle ecole ? y 'a pas marque jung ou jesus sur mon front ! ils sont tous tombes dans le piege du mental, de la croyance, des theories .. non je n'apporte rien justement , il y a eu assez de blabla, il n'y a pas de portes de sorties, il faut porter son karma jusqu'a la mort.

      Effacer
    7. Je ne veux rien. Je remarque simplement que ta critique est un exemple de pensée négative qui se mord la queue sans rien apporter au débat. Le mieux que tu puisses faire est selon moi de l'appliquer à tes propres croyances, ce qui t'amènera peut-être à te taire. Pour ma part, je ne vois pas l'intérêt de poursuivre cette discussion...

      Effacer
  5. Je croirai pour ma part à l'intelligence artificielle quand celle-ci rêvera. Azimoz suppose cette théorie qui serait l'émergence d'un niveau de complexité. Pour ma part, ce n'est pas tant de la quantité d'information traité que du nombre de connexion entre ses informations et d'un "accident" qu'émergera cette dernière.

    Pour ce qui est des derniers paragraphes et de Jung, on peut-être porté à croire que finalement pour le salut de l'humanité cela revient à dire que c'est chacun pour soi et "sauve-toi toi-même". Il n'y a rien à espérer de la collectivité et cela résume bien les derniers propos de Bouddha avant son départ qui disait "Tout est impermanence, travailler à votre Salut". Bref, t'es seul mon homme débrouille-toé comme tu peux...Si t'as de la chance t'en mieux, si t'en a pas tant pis. Peut-être tout cela est-il déjà programmé et il n'y a finalement aucune conscience et libre arbitre. La mère de Bouddha avait rêvé d'un éléphant blanc sortant de son orteil (ou autres variantes selon les sources) et comme par hasard cela s'adonne que c'est l'éveillé (donc déjà prédestiné). Je vous réfère à l'entrevue de Catherine Perrin avec Thomas Boraud : http://ici.radio-canada.ca/emissions/medium_large/2015-2016/chronique.asp?idChronique=388942 ou il est dit que "cette impression de décision consciente a pu être un avantage évolutif, puisqu'elle permet la construction des sociétés. « Il n'y a pas de société possible si l'on ne se sent pas responsable. ». Ainsi on pense être conscient et maître de son destin mais les dés sont pipés. Dieu ne joue aux dés...comme disait l'autre...

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. En effet, le jour où un ordinateur rêvera, je croirais moi aussi qu'il est conscient. Et j'analyserai son rêve avec intérêt... ;-)

      Oui. Il y a beaucoup d'éléments qui laissent à penser qu'en effet, il n'y a pas de "libre arbitre", ou plutôt, comme le disent les non-dualistes radicaux (par exemple Ramesh Balsekar) : "il y a des actions mais rien ne prouve qu'il y ait un agissant". Cette idée permet au moins d'accepter son propre destin sans rechigner et se comparer à autrui.

      Quant à l'affirmation d'Einstein comme quoi Dieu ne joue pas aux dés, il faut la replacer dans son contexte de la discussion avec Niels Bohr sur la physique quantique. Et là, Einstein a perdu une occasion de se taire car depuis, il est prouvé que le domaine quantique est probabiliste. Mais nous ne sommes pas des particules quantiques... :-)

      Effacer
    2. l'homme est la preuve que l'intelligence artificielle existe deja, le corps et l'esprit de l'homme sont des machines , la pensée pense mecaniquement sans arret. L'inconscient lui meme est une machine car les reves sont mecaniques, on reve toutes les nuits et on reve toujours de la meme maniere, meme si le contenu change tout le temps,la forme et le langage du reve est toujours la meme.
      La verite c'est que nous sommes des intelligences artificielles tres vraissemblablement crée par quelque chose qui nous depasse et que nous sommes aussi en partie a un niveau fondamental. La question est donc de decouvrir ce qui est veritablement intelligent chez nous ...

      Effacer
    3. Il suffit de se regarder dans la glace pour voir qu'on a pas choisit sa tete ni son corps, le corps est un outil d'exploration pour l'etat de veille. De meme on a pas choisit son mental, on ne choisit pas de penser comme on pense, la pensée s'impose a nous c'est une machine, les reves aussi simposent a nous c'est machinal, artificiel.
      La bonne question a se poser serait : y a til quelque chose en nous qui ne soit pas artificiel ? qui soit une preuve d'une veritable intelligence autonome ? je pense que nous sommes la preuve qu'un vraie Intelligence existe meme si nous ne sommes pas cette Intelligence. Pour constuire un ordi il faut un constructeur...quelque chose en nous qui nous est inacessible est ce Constructeur. Pour aparaitre a l'etat de veille et pour rever il faut une extraordinaire intelligence derriere meme si on s'en rend pas compte.

      Effacer
    4. Merci pour ces réflexions fort intéressantes. Dans le vocabulaire de Jung mais aussi de l'Orient, cette véritable intelligence (le Constructeur) serait ce qu'on appelle le Soi (Atman). La limite de ce raisonnement est cependant que c'est encore le Constructeur qui émet ces commentaires et discute avec Lui-même ici à son propre sujet, ou qui interroge le sens des rêves qu'il produit...

      Effacer
    5. Sauf que tu n'as pas acces au noyau dur de toi meme et j'en veux pour preuve que la tout de suite maintenant tu n'es pas omniscient ni omnipotent,tu doutes... tu peux creer des reves et la realité de veille mais tu ne sais pas comment ni pourquoi, tu es comme endormi a toi meme si tu es vraiment le Constructeur.
      Simplement tu ne peux surement pas te reveiller tout en continuant a etre humain, problablement que tu dois mourir pour te reveiller mais en mourant tu perds ton humanité et tu ne pourras pas revenir or tu t'aimes suffisamment pour l'instant pour ne pas vouloir partir...

      Effacer
    6. Parce que toi, Nexus, tu es omniscient et omnipotent ? C'est trop drôle. Alors, je suppose que tu connais la signification du pseudonyme que tu t'es, sans doute inconsciemment, choisi...

      Effacer
    7. personne n'est omniscient ni omnipotent , dans l'au dela peut etre, a un autre niveau qui sait ? mais moi je ne dis pas qu'il y a un travail a faire sur soi en prenant mon cas pour une generalité, je n'ai aucun travail a faire a titre personnel mais vous etes libre de vous inventer un travail ou une quete personnelle...
      Mon vrai pseudo es Satan en fait mais on m'appelle Galactus dans l'espace ou Nexus quand je suis sur terre en mode super guerrier...enfin mon prenom humain signifie riviere obscure au niveau primitif bien sur...

      Effacer
    8. Un "nexus", dans l'Antiquité romaine, était un esclave, réduit à cette condition parce qu'il n'avait pas payé ses dettes. Merci de nous reconnaitre la liberté de nous inventer un travail ou une quête personnelle si on aime cela.

      Effacer
    9. C'est cool alors, je suis surement le prophete de la revolte des esclaves , celui qui ose defier Dieu, Satan en personne, l'Antechrist peut etre...

      Effacer
    10. Nexus, il n'y en a décidément que pour ton nombril qui semble avoir des proportions cosmiques. Tu m'excuseras de rétablir la "censure" car je suis pas intéressé à ce que tu continues à polluer ce blogue avec tes réflexions qui me semblent tourner en rond. Ton point de vue est clairement exprimé pour qui veut s'y intéresser, et à moins que tu n'aies d'autres choses plus intelligentes à exprimer, je ne laisserai plus passer tes messages qui n'apportent pas grand chose selon moi. Je continue de m'interroger sur pourquoi tu éprouves le besoin de déverser tes "lumières" ici ? Ta grande sagesse devrait me semble-t-il t'amener à te taire et laisser les autres rêver en paix si tel est leur bon plaisir...

      Effacer
  6. Désolé pour le retard pris dans la publication de vos commentaires. Je suis obligé de les modérer du fait de la pollution qu'y introduit certain commentateur depuis quelques temps. Mais je suis en déplacement ces jours-ci avec un accès limité et rare à Internet.

    RépondreEffacer
  7. J'ai le goût de citer Nicholas Georgescu-Roegen qui dit dans l'édition Hors-Série du magasine Le Point collection Référence "Éloge de la vie simple" les mots suivants dans une optique de réduction de frénétique mode vie : "L'humanité voudra-telle prêter attention à un quelconque programme impliquant des entraves à son attachement au confort ? Peut-être le destin de l'homme est-il d'avoir une vie brève mais fiévreuse, excitante et extravagante, plutôt qu'une existence longue, végétative et monotone. Dans ce cas, que d'autres espèces dépourvues d'ambition spirituelle - les amibes par exemple - héritent d'une Terre qui baignera longtemps encore dans une plénitude de lumière solaire !"...Le terme "ambition spirituelle" ici résonne fort en moi et me porte à pense que c'est peut-être cette caractéristique plus que tout autre qui nous mènera à notre perte.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Pour ma part, je crois que l'Univers a l'ambition de se connaitre au travers de notre regard. Si l'expérience humaine devait échouer, comme dit Théodore Monod, il se trouvera certainement une autre espèce pour prendre le relai de cette "ambition spirituelle". Des amibes à nous, il y a un processus incessant de croissance de la conscience que l'on appelle "évolution"...

      Effacer
    2. la seule ambition de l'univers c'est d'etre, " je suis " et tout participe de ce " je suis "

      Effacer
    3. Voilà qui est bien dit.

      Et qu'est-ce qu'être sans la conscience d'être ? Pur néant, indissociable du non-être qui cependant n'est pas. C'est pourquoi la conscience est bien « une lumière dans les ténèbres de l’être pur et simple. »

      Effacer
    4. etre sans la conscience d'etre ca nous arrive tout le temps a l'etat de veille et dans le sommeil , ce n'est pas le neant ...

      Effacer
  8. Nexus, j'avais une pensée pour toi quand je suis tombé sur ce texte dans "les entretiens de Lin-Tsi" qui me semble fort bien résumer ton propos :

    Le maître dit : "Adeptes, il n'y a pas de travail dans le bouddhisme. Le tout est de se tenir dans l'ordinaire et sans affaires : chier et pisser, se vêtir et manger. (...) Soyez votre propre maître où que vous soyez, et sur-le-champ vous serez vrais".


    Belle synchronicité, n'est-ce pas ? Ceci étant dit, à quoi bon le répéter sur tous les tons ? Pourquoi donc ne pas laisser travailler en paix ceux qui travaillent sans travailler ?

    RépondreEffacer