vendredi 11 juillet 2014

Le Bouddha et le serpent

Dans son autobiographie balancing heaven and earth, l’analyste jungien Robert A. Johnson[1] raconte un grand rêve qui a changé sa vie. C’est le plus grand rêve dont j’ai eu connaissance jusqu’ici, un rêve stupéfiant qui a selon moi une portée collective aussi importante qu’individuelle. Le voici tel que Johnson le raconte (ma traduction) :

« Tous les mille ans, un Bouddha naît. Dans mon rêve, le Bouddha naît au milieu de la nuit. Une étoile brille alors au firmament pour annoncer la naissance du Bouddha. Je suis là, et j’ai le même âge tout au long du rêve. J’assiste à la naissance du Bouddha, et je le vois grandir jusqu’à ce qu’il soit un jeune homme, comme moi, et nous sommes des compagnons inséparables. Nous sommes bons copains (la témérité d’une telle affirmation). Nous sommes heureux ensemble, et il y a beaucoup d’amitié et d’intelligence entre nous.

Un jour nous arrivons à une rivière qui coule dans deux directions en même temps. La moitié de la rivière coule dans un sens, l’autre coule dans le sens inverse ; au centre de la rivière, où se touchent les deux courants, il y a de très grands tourbillons. Je les traverse à la nage mais le Bouddha est pris dans un tourbillon et se noie.

Je suis inconsolable ; mon compagnon est parti. Alors j’attends un millier d’années, une lumière brille à nouveau au firmament, et à nouveau le Bouddha naît au milieu de la nuit. Je suis le compagnon du Bouddha pour une autre longue période. Je ne me souviens plus des détails mais pour quelque raison, je dois à nouveau attendre un millier d’années pour la naissance du troisième Bouddha. À nouveau, une étoile brille et le Bouddha naît au milieu de la nuit, et je suis son compagnon tandis qu’il grandit. Nous sommes amis et je suis heureux. Puis je dois attendre un autre millier d’années, jusqu’aux temps modernes, pour que le Bouddha naisse une quatrième fois.

Cette fois cependant, les circonstances sont différentes. Une étoile brillera dans le ciel pour annoncer la naissance du Bouddha, mais celui-ci naîtra à l’aube. Et il naîtra d’un trou dans un arbre quand les premiers rayons de lumière du soleil levant l’éclaireront ; je suis transporté de joie par anticipation car j’ai attendu mille ans que mon compagnon bien-aimé renaisse.

Les premiers rayons du soleil arrivent. Ils touchent d’abord le sommet de l’arbre, puis descendent à mesure que le soleil se lève. Alors que les rayons du soleil touchent le trou dans l’arbre, un énorme serpent en sort. Le serpent est gigantesque, long d’une trentaine de mètres, et il vient droit sur moi !

Je suis tellement terrifié que je tombe à la renverse. Puis je me remets sur mes pieds et je coure aussi vite que je peux. Quand je pense que je suis assez loin, je regarde autour de moi, pour m’apercevoir alors que le serpent me coure après et qu’il maintient sa tête juste au-dessus de la mienne. Alors je coure avec deux fois plus d’énergie en proie à la terreur. Mais quand je me retourne et je jette un œil, la tête du serpent est encore exactement au-dessus de ma tête ! Je coure encore plus vite et je constate que le serpent est encore là, et je sais qu’il n’y a aucun espoir. Alors, intuitivement, je forme un cercle en touchant ma hanche droite avec mon bras droit. Je coure toujours, et le serpent passe ce qu’il peut dans le cercle, et je sais qu’il n’y a plus de danger. Quand le rêve se termine, nous courons toujours au travers de la forêt, mais maintenant le serpent et moi parlons et le danger a diminué. »

Le rêveur a alors trente-six ans. Il faut préciser d’emblée qu’il n’est pas bouddhiste même s’il est attiré par l’Orient; bien des années plus tard, il aura l’impression de « rentrer chez lui » en voyageant en Inde mais à cette époque de sa vie, il ne connaît pas grand-chose de la vie et des enseignements du Bouddha. C’est un Nord-Américain né en Oregon. Il a été attiré par le catholicisme, a passé quelques temps dans l’entourage de Krishnamurti qui vivait alors en Californie puis a été poussé par ses rêves à s’engager dans une analyse de ceux-ci avec un jungien. Le rêve est survenu alors qu’il était à Zurich en Suisse où il était venu étudier la psychologie des profondeurs à l’Institut Carl Jung qui venait d’ouvrir ses portes (1948). Quand il l’a raconté à son analyste, le Dr Jacobi, elle a refusé de le commenter en disant que c’était un rêve de vieille personne, qu’il ne devrait pas faire de tels rêves !

Il a d’abord été désemparé par cette réponse puis il a changé d’analyste et, après des semaines d’hésitation, a confié son rêve à l’épouse de Jung, Emma Jung. Celle-ci n’en a pas dit grand-chose mais au moins ne l’a-t-elle pas rejetée, et elle en a parlé le soir même à son auguste époux. Le lendemain, alors qu’il est en train de suivre un cours à l’Institut, Johnson est appelé au téléphone : c’est Carl Jung, qui lui dit qu’il veut le voir immédiatement. Il connaissait le chemin jusqu’à la maison des Jung mais ce voyage-ci a été particulièrement émouvant, raconte-t-il. Son récit nous apprend que Jung avait un petit chien, Joggi, qui était réputé détecter les visiteurs à tendances psychotiques ; il se mettait alors à grogner et à aboyer, agissant comme un gardien du temple. Johnson n’a pas attendu longtemps avant d’être introduit dans le bureau de Jung, qui l’attendait avec une copie de son rêve en main et lui a assené tandis qu’il s’asseyait :

-  Vous êtes appelé à une vie intérieure. Si vous demeurez loyal au monde intérieur, il va prendre soin de vous. C’est ce à quoi vous êtes dédié dans cette vie. Je dois vous dire immédiatement que vous ne devriez jamais rejoindre quoi que ce soit d’extérieur.

On peut imaginer le choc ressenti par le rêveur. Il venait à peine de rencontrer cet homme et voilà qu’il lui disait comment vivre sa vie. Le Dr Jung a continué à parler sans lui laisser une chance de poser une question ; bien au contraire, il lui a signifié qu’il ne voulait pas être interrompu.

-  Vous devez apprendre que, quel que soit votre besoin, cela apparaîtra. Même si vous faite quelque chose qui ait quelque valeur sociale, c’est votre relation avec l’inconscient collectif qui donne sens à votre présence sur terre.

Ce rêve, ajouta Jung, était un signe clair que le rêveur devait vivre sa vie en se concentrant sur l’intérieur, et que cela prendrait toutes ses ressources pour traiter avec les forces de l’inconscient, qui se montraient particulièrement puissantes dans son cas. Le Dr Jung, dit-il, semblait lire son esprit. Il lui expliqua qu’il avait toujours espéré trouver une communauté qu’il puisse considérer comme sa famille d’esprits et qu’il continuerait sans doute à avoir ce besoin, mais que ce n’était pas son chemin. Il alla jusqu’à dire que le rêveur ne devrait jamais se marier ou rejoindre quelque organisation que ce soit, et qu’il devrait se contenter de passer la plus grande partie de sa vie seul.

-  Vous êtes un de ces solitaires qui vivent dans le monde. N’adhérez à rien. Cela vous empoisonnerait. Dévouez vos énergies à l’inconscient collectif. Maintenez les dimensions extérieures de votre vie aussi modestes que possible.

Johnson était tout à la fois terrifié par ce qu’il entendait, et rempli d’espoir. Jung était, bien que discourant, très gentil et se préoccupait visiblement de son bien-être. À plusieurs reprises, il lui a répété un avis extrêmement important pour quiconque travaille avec l’inconscient :

-  Souvenez-vous, s’il-vous-plaît. C’est ce que vous êtes qui guérit, pas ce que vous savez.

Johnson a été d’autant plus frappé par ce point qu’il n’avait encore jamais parlé à quiconque de son désir de devenir analyste. En se promenant dans le jardin avec lui, Jung ajouta :

- Quand vous formez un cercle avec votre bras, le serpent parle avec vous. Comprenez-vous ce que cela signifie ? C’est un mandala, un cercle magique. Cela implique vous ne pouvez survivre à une expérience submergeante de l’inconscient qu’en lui donnant forme. Vous voyez ? Vous devez vous concentrer sur le fait de contenir ces énergies ou elles vont vous détruire.

Jung a laissé entendre que cela prendrait sans doute toute une vie pour intégrer ce rêve. Il a rigolé à la réaction du Dr Jacobi en disant qu’on peut toujours dire à une jeune fille qu’elle ne devrait pas être enceinte, mais que quand elle l’est, il faut aller avec cette réalité. Il s’est lancé dans de longs développements sur l’apparition de la quatrième fonction psychologique[2], symbolisée dans le rêve par le serpent, qui permettrait au rêveur de réaliser une conscience complète. Nous avons tous, selon Jung, une fonction psychologique dite inférieure qui n’est pas développée, qui constitue notre point aveugle dans notre relation à la réalité. Le rêve indiquait à Johnson le chemin de son individuation, c’est-à-dire comment il deviendrait pleinement « celui qu’il est » en intégrant son inconscient pour devenir un être complet, ayant retrouvé la part manquante de lui-même, individué dans le sens de "non-divisé".

Robert Johnson dit qu’il voit maintenant, avec le recul, que sa vie a été un accomplissement par bien des aspects de ce rêve et qu’il est infiniment reconnaissant au Dr Jung de lui avoir indiqué tout ce qu’il avait à savoir pour vivre cette vie. Il souligne comment il a été renversé bien des années plus tard d’apprendre que dans la mythologie bouddhiste, le Bouddha est protégé des démons qui l’attaquent par Naga, le grand cobra cosmique qui se tient au-dessus de sa tête. Il a alors compris que ce grand serpent qui lui faisait si peur, et qui l’a fait courir, dit-il avec humour, pendant plus de trente ans, était en réalité protecteur.

Il y a beaucoup de symboles dans ce rêve qui appelleraient un commentaire approfondi et une amplification. Il est particulièrement frappant que le rêveur ne change pas d’âge au cours du rêve, ce qui signale que son point de vue est celui de l’éternité, du Soi. Les renaissances du Bouddha donnent à penser à une allusion à la réincarnation. On peut voir la dualité de la vie symbolisée dans cette rivière à double sens dans laquelle se noie le premier Bouddha. Mais le point que j’aimerais souligner ici tient à l’importance du symbole du serpent, dont Johnson dit qu’il a fini par comprendre que c’est ici encore un aspect du Bouddha, sous une forme terrifiante. D’ailleurs, dans un rêve subséquent, bien des années plus tard, le serpent est réapparu et s’est transformé en un jeune homme lumineux. Cependant, Johnson est auparavant passé par ce qu’on appelle souvent la « nuit noire de l’âme » et il souligne que cet accomplissement tient plus de l’enténèbrement (endarkment) que de l’illumination.

Le serpent est un symbole ambivalent, paradoxal en lui-même. Johnson dit qu’il représente la transformation et la qualité dionysiaque en lui, c’est-à-dire sa capacité à vivre la joie, l’extase, le plaisir de la vie terrestre. Le serpent est présent dans d’innombrables cultures, et presque invariablement, il est associé avec la santé physique et spirituelle, comme par exemple dans le caducée grec. En Inde, la kundalini est représentée comme un serpent se dressant et éveillant les sept centres de la conscience ; elle est synonyme de vitalité radicale, d’éveil total. Mais dans notre culture, le serpent est associé au mal et à la corruption, à ce qui est rejeté par l’ordre divin. Cependant, même cette image est ambigüe car qui a donc créé le serpent et l’a installé au jardin d’Éden ? On a des représentations très anciennes de Yahvé ayant des pieds de serpent qui suggèrent un dépassement de la dualité du bien et du mal, c’est-à-dire l’idée que la Loi, quelle qu’elle soit, est aussi faite pour être transgressée en conscience.

Pour saisir toute la portée du serpent ici, il faut le considérer en regard des trois Bouddhas. Ces derniers symbolisent une perfection idéale d’accomplissement spirituel, mais ils n’échappent pas à la dualité cependant, par exemple quand le premier Bouddha se noie. Pour que le mandala de la conscience soit complet, il faut intégrer l’exact opposé complémentaire de cet idéal, le serpent, qui rampe à terre tandis que l’esprit vole, et qui dans notre culture est associé au mal, à ce qui est rejeté dans l’obscurité. Pour de nombreux chercheurs spirituels, le mal c’est la terre, ses désirs et ses plaisirs, les émotions et le corps, le versant féminin de l’être. La clé du rêve est dans ce que dit finalement Johnson : « j’ai banni le mot spiritualité de mon vocabulaire car il semble impliquer d’abandonner la dimension terrestre. » Un terme plus adéquat, malheureusement sans équivalent en français, est le « soulwork », le travail de l’âme qui tisse ensemble le ciel et la terre, le haut et le bas, le lumineux et l’obscur.

C’est dans ce qui nous fait le plus peur et que nous fuyions, qui semble vouloir nous dévorer… que se cache la bénédiction protectrice des profondeurs, la grâce qui guérit. Dans les mots de Jung : « On n’atteint pas l’illumination en invoquant des êtres de lumière mais en rendant l’obscurité consciente ».



[1] Auteur en particulier de He, She, We, que je saurais que recommander à qui veut comprendre en profondeur les dynamiques du masculin, du féminin et de la relation entre ces deux, ainsi que Inner Work, un manuel pratique de travail avec les rêves et l’imagination active. À ce jour, cela demeure une énigme que Johnson n’ait jamais été traduit en français, mais son anglais est accessible, sans complications intellectuelles.
[2] Pour la psychologie des profondeurs, la conscience se déploie au travers de quatre fonctions: la sensation, le sentiment, la pensée, l’intuition. Nous nous contentons généralement de développer trois de ces fonctions, dont l’une est dominante tandis que la quatrième demeure alors dans l’inconscient.

31 commentaires:

  1. C'est avec le plus vif intérêt que j'ai lu votre article sur Bouddha et le serpent. Il m'a tenue en haleine.
    J'ai trouvé passionnante la rencontre de Johnson et Jung. Ca m'a amusée que l'analyste Yolande Jacobi fasse une bourde pareille. Cette histoire est très importante parce qu'elle montre clairement que l'inconscient ne se laisse pas sous -estimer. Le rêve est arrivé à Jung, sans que Johnson le cherche. J'ai beaucoup aimé votre commentaire si juste. Vous attirez l'attention sur l'exact opposé de l'idéal, la valeur du serpent, et le vrai soulwork, c'est bien de l'intégrer. Jung le savait. Vous le savez aussi. Merci Jean de le dire à vos lecteurs. Votre bel article les aidera dans la recherche du divin.

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    1. Merci Christiane pour ce commentaire. Ainsi que vous le dites, je crois important de souligner que l'inconscient ne se laisse pas sous-estimer. L'idéalisme qui ne tient pas compte du serpent peut être dangereux, car finalement ce que nous appelons "inconscient" se révèle être une puissance indomptable, tout à la fois divine et animale.

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  2. Bonjour Jean,

    Quel rêve ! Et quelle magistrale interprétation assortie des sages conseils d’un Jung qui avait alors (en 1948) une très longue et très riche expérience du dialogue avec l’inconscient, avec le monde intérieur.

    Je me demande si le jugement dépréciatif émis par Rolande Jacobi n’a pas été induit et voulu par une sorte "d’instance supérieure", comme si un fatum, un destin, voulait que ce rêve fût rapidement porté à la connaissance de Jung, ce qui ne ce serait peut-être pas produit, ou pas au moment opportun, si Rolande Jacobi en avait proposé au rêveur une interprétation moins percutante que celle faite par Jung.

    Parmi les conseils donnés au rêveur par Jung, il en est un qui, comme tu l’as bien souligné, Jean, est particulièrement important, essentiel. Je te cite :

    « À plusieurs reprises, il lui a répété un avis extrêmement important pour quiconque travaille avec l’inconscient :
    - Souvenez-vous, s’il vous plaît. C’est ce que vous êtes qui guérit, pas ce que vous savez. »

    Voilà une clé, mais aussi une pierre d’achoppement pour toutes celles et tous ceux qui fondent un peu trop leur pratique d’analyste ou d’interprète de rêves sur des savoirs, sur des théories, ou encore sur des méthodes qu’ils placent en somme avant « ce qu’ils sont », avant l’effet curatif de leur propre degré de réalisation de Soi.
    On sait ce que Jung pensait des théories et des méthodes. Il a dit plus d’une fois, en substance ou à peu près en ces termes, qu’elles étaient tout juste bonnes pour les jardins d’enfant, qu’elles n’étaient que des béquilles plus ou moins utiles à celui ou à celle qui ne savait pas encore se tenir debout sur ses propres jambes.

    Marie-Louise von Franz nous rappelle, pour sa part, que l’aspect éthique ne doit surtout pas être oublié par les personnes qui pensent avoir fait le tour du processus d’individuation parce qu’elles en ont plus ou moins fait le tour intellectuellement ou/et intuitivement :
    « Prenons les intuitifs intellectuels qui parcourent très rapidement le processus analytique et paraissent comprendre énormément de choses à la psychologie junguienne et aux processus intérieurs. Ils assimilent beaucoup d'éléments qu'ils ne ressentent toutefois pas comme éthiques. Le sentiment est laissé de côté et l'aspect éthique est par suite oublié, ce qui signifie qu'ils ont un comportement éthique dans le monde extérieur qui se poursuit sur le mode ancien, qu'ils se conforment peut-être toujours à la raison ou à l'influence du collectif, etc. Ils parlent du processus d'individuation comme s'ils en avaient fait le tour et connaissaient tout de lui, ce qui est tout à fait vrai, d'une certaine manière, car ils l'ont assimilé et vécu dans le feu pourrait-on dire ; mais non dans la terre. Le feu doit donc se transformer en eau et l'eau en terre. Ainsi l'ensemble demande à être revécu une nouvelle fois en tant que problème éthique.
    Ce genre de personnes découvrent parfois brusquement qu'elles sont à nouveau au tout début, qu'elles n'ont même pas appris l'ABC de l'ombre ou de tout autre problème, elles se rendent compte que, maintenant, elles comprennent finalement ce qu'auparavant elles n'avaient saisi que partiellement. » - Marie-Louise von Franz, Alchimie – Une introduction au symbolisme et à la psychologie, Éditions La Fontaine de Pierre
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    Entre un analyste très savant mais à l’éthique sous-développée et un autre analyste peut-être moins savant mais éthiquement très sûr, honnête, il faut choisir sans la moindre hésitation le deuxième.
    Merci, Jean, pour cet excellent article (un de plus ici !) et pour tout ce qu’il nous permet de découvrir et de méditer.

    Amezeg

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    1. Merci Amezeg pour ces bons mots et pour cette précieuse citation de Von Franz. Je suis d'accord avec toi que l'injonction de Jung est tout particulièrement essentielle en cette époque où nous nous fions tellement aux diplômes et où nous croyons volontiers en avoir fini avec quelque chose parce que nous l'avons compris intellectuellement. Au fond, on retrouve ici la sagesse du Tao Të King: celui qui parle ne sait pas, et celui qui sait ne parle pas (ou pas plus que nécessaire :).

      Ton conseil de choisir l'analyste plus éthique me semble précieux et mériter d'être souligné à l'usage de nos lecteurs. L'éthique est le point crucial en effet, trop souvent négligé, qui permettra de dire "je ne sais pas" et de laisser la porte ouverte à l'inconscient là où le savant ne saura pas "baisser la tête".

      J'aime cette idée d'un fatum ayant amené Mme Jacobi, par ailleurs une analyste émérite, à s'effacer devant ce rêve. La rencontre entre Johnson et Jung autour de ce rêve était en effet "nécessaire" et s'est révélée très fructueuse...

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  3. Erratum - Me trompant entre deux prénoms aux sonorités voisines, j’ai noté dans mon précédent commentaire "Rolande" Jacobi quand j’aurais dû noter Yolande Jacobi
    .
    Amezeg

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  4. Le hasard d’une relecture m’a remis aujourd’hui sous les yeux un passage de ‘Ma vie’ dans lequel Jung nous rappelle que celui ou celle qui néglige ou rejette l’aspect éthique lié à toute connaissance issue des images et manifestation inconscientes TOMBE SOUS LA COUPE DU PRINCIPE DE PUISSANCE et SOLLICITE LES EFFICACITÉS NÉGATIVES DE L'INCONSCIENT.

    C’est, hélas ! une réalité que j’ai pu constater lors d’échanges sur tel ou tel blog ou site s’intéressant de très près aux rêves et se référant explicitement à Jung. On s’aperçoit alors, avec tristesse, que ce qui s’annonce à grand bruit de trompettes comme connaissance de soi et de Soi n’est en réalité qu’ignorance dangereuse de soi-même et dangereuse usurpation de valeur...

    Ce n’est pas le cas ici, sur La voie du rêve, Dieu merci !

    Voici le passage relu aujourd’hui :
    « Mes recherches scientifiques furent le moyen et la seule possibilité de m'arracher à ce chaos d'images. Sinon, ce matériel se serait agrippé à moi comme des teignes de bardane, ou m'aurait enlacé comme des plantes de marécages. Je mis le plus grand soin à comprendre chaque image, chaque contenu, à l'ordonner rationnellement — autant que faire se pouvait — et, surtout, à le réaliser dans la vie. Car c'est cela que l'on néglige le plus souvent. On laisse à la rigueur monter et émerger les images, on s'extasie peut-être à leur propos, mais, le plus souvent, on en reste là. On ne se donne pas la peine de les comprendre, et encore bien moins d'en tirer les conséquences éthiques qu'elles comportent. Ce faisant, on sollicite les efficacités négatives de l'inconscient.
    Même celui qui acquiert une certaine compréhension des images de l'inconscient, mais qui croit qu'il lui suffit de s'en tenir à ce savoir est victime d'une dangereuse erreur. Car quiconque ne ressent pas dans ses connaissances la responsabilité éthique qu'elles comportent succombera bientôt au principe de puissance. Des effets destructeurs peuvent en résulter, destructeurs pour les autres, mais aussi pour le sujet même qui sait. Les images de l'inconscient imposent à l'homme une lourde responsabilité. Leur non-compréhension, aussi bien que le manque du sens de la responsabilité éthique, privent l'existence de sa totalité et confèrent à bien des vies individuelles un caractère pénible de fragmentarité.» C.G.Jung, " Ma vie", chapitre : Confrontation avec l’inconscient, Éditions Gallimard

    Amezeg

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    1. Merci Amezeg ! Nous touchons ici à la question ô combien cruciale et si souvent négligée de la responsabilité éthique. Ce n'est pas faute que Jung et Von Franz, pour ne citer que ceux-là, en aient parlé, aient tenté d'attirer l'attention sur ce point. Mais nous sommes portés à traiter l'inconscient comme une matière qu'on pourrait intellectualiser, analyser comme s'il était séparé de nous-mêmes. Dès lors, me semble-t-il, qu'on prétend en faire un "savoir" se pointe l'enjeu du pouvoir, et Jung faisait remarquer que là où il y a volonté de puissance, il n'y a pas d'amour (et réciproquement). Mais tu me sembles être arrivé à la même conclusion que moi: là où il y a expérience vivante, il n'y a pas de savoir, ce n'est pas nous (le conscient) qui détenons la connaissance.

      Je dois avouer que je ris de voir le nombre de gens qui se présentent en prétendant qu'ils ont inventé une nouvelle "méthode" d'analyse des rêves ou de guérison sans se rendre compte de combien ils tout simplement ridicules dans leur prétention. Cette prétention est aussi celle des "jungiens" qui s'emparent du travail de Jung pour s'en faire un drapeau qui leur sert péniblement de cache-sexe; en voilà d'autres qui sont portés à dire "j'ai compris et je sais mieux que vous". Ce sont jusqu'aux analystes qui se croient fondés à exercer parce qu'ils ont un papier qui se fourvoient de ce point de vue; Jung ne voulait pas fonder d'école car ces choses-là ne s'apprennent pas ainsi. Quand il a envoyé Johnson travailler en Angleterre, celui-ci lui a dit: mais je n'ai pas terminé mes études à l'Institut ! Jung a alors sorti un papier de son tiroir, a apposé le nom de Johnson et sa signature et lui a dit: ça vous va, comme diplôme ? Allez, maintenant, au travail !...

      Quant à la responsabilité éthique, c’est donc non seulement de notre responsabilité de tirer des conclusions effectives dans notre vie de ce que nous communique l’inconscient qu’il est question, sans laquelle le travail est vain, mais aussi de notre responsabilité vis-à-vis de l’inconscient, de la source de ces images et de tout ce que nous croyons être « notre » connaissance…

      Tu auras l'occasion de me lire bientôt sur ces questions qui sont au cœur de ce qui me préoccupe, sans que je n'ai de réponse à offrir d'ailleurs. Pour l'instant, le meilleur énoncé que je connaisse du problème me semble être dans cette histoire hassidique:

      Le Baal Shem Tov avait de nombreux étudiants. Il arriva qu'un nouveau philosophe vienne donner une conférence en ville. Les étudiants demandèrent au Baal: pouvons-nous aller l'écouter ? et celui-ci répondit: bien sûr. Alors, un étudiant un peu plus futé que les autres demanda:
      - Mais comment saurons-nous s'il dit la vérité ?
      Le Baal réfléchit et répondit:
      - Demandez-lui comment venir à bout du démon du pouvoir...
      Les étudiants étaient très contents avec ça, s'apprêtaient à y aller mais sur le pas de la porte, le plus futé demanda encore:
      - Mais quelle est la bonne réponse ?
      Le Baal éclata de rire:
      - S'il vous donne une réponse, c'est que c'est un escroc !

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  5. Tu as tout à fait raison de rappeler que le pouvoir et l’amour s’excluent, comme Jung l’a souligné à maintes reprises dans ses écrits. J’y songeais en notant mon précédent commentaire et me disais que, somme toute, l’éthique est de répondre aussi scrupuleusement que possible à la volonté du Plus grand que nous et donc de nous ouvrir à l’amour qui dépasse nos petites volontés et nos petites amours humaines trop humaines. Un chemin difficile...!!

    Jung cite dans "Ma vie " le premier verset de la Première épître aux Corinthiens, qui est le suivant : « Quand bien même je parlerais toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, si je n’ai pas l’amour, je ne suis qu’airain qui sonne, cymbale qui retentit. »
    Le deuxième verset déclare : « J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien. »

    Le "diplôme" doit venir en premier lieu de l’intérieur sous forme d’une invitation durable et éventuellement confirmée et renouvelée, formulée par les rêves en particulier ; faute de quoi les certifications extérieures ne sont que des "peaux d’âne" et...des peaux de banane qui feront un jour ou l’autre chuter celles et ceux qui les prennent pour ce qu’elles ne sont pas. Jung avait certainement reconnu à certains signes évidents, rêves ou autres messages, que le Maître intérieur invitait R.A.Johnson à se mettre à l’œuvre comme analyste et il s’est donc amusé de l’affaire de la "peau d’âne".

    L’histoire histoire hassidique que tu cites m’a aussitôt rappelé l’enseignement que propose l’hexagramme 51du Yi King. Aucune réponse définitive, seulement la nécessité d’un examen scrupuleux et persévérant. Dans ce domaine de l’éthique, rien n’est jamais entièrement et définitivement acquis. Il faut savoir "rectifier" ce qui doit l’être :
    « 51. Tchen / L'Éveilleur, l'Ébranlement, le Tonnerre –
    L'Image
    Tonnerre continu :
    Image de L'ÉBRANLEMENT.
    Ainsi l'homme noble, dans la crainte et le tremblement, rectifie sa vie et s'examine lui-même.
    Le tonnerre continu, par la commotion qu'il cause, amène avec lui la crainte et le tremblement. Ainsi l'homme noble observe toujours une attitude de révérence devant la manifestation de Dieu; il met de l'ordre dans sa vie et examine son cœur pour voir si rien ne s'y oppose secrètement à la volonté divine. Ainsi la crainte est le fondement du véritable art de vivre. » Voir ici : http://wengu.tartarie.com/wg/wengu.php?no=51&lang=fr&l=Yijing

    Je te lirai avec plaisir, Jean, lorsque tu écriras sur ces questions si importantes, cruciales.

    Amezeg

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    1. Merci. Tout est dit, n'est-ce pas ? "Sans l'amour, je ne suis rien" et "la crainte est le fondement du véritable art de vivre", ce qui nous renvoie à "la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse" et l'amour en est la floraison...

      Je retiens ta définition de l'éthique, exigeante mais que je crois très juste. Je souris de nous voir par là ramenés à nos chers alchimistes et à leur définition lapidaire du VITRIOL: Visita Interiora Terrae Rectificando Occultum Lapidem (visite l'intérieur de la Terre et en te rectifiant tu trouveras la pierre cachée).

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  6. « Quant à la responsabilité éthique, c’est donc non seulement de notre responsabilité de tirer des conclusions effectives dans notre vie de ce que nous communique l’inconscient qu’il est question, sans laquelle le travail est vain, mais aussi de notre responsabilité vis-à-vis de l’inconscient, de la source de ces images et de tout ce que nous croyons être « notre » connaissance… » dis-tu, Jean.

    C’est très vrai. Il faut, d’une certaine façon, en arriver à la dépossession de toute connaissance pour ne pas être possédé par elle, pour ne pas se faire avoir par l’esprit de possession qui nous fera mésuser de cette connaissance et nous fera nous identifier à elle jusqu’au point de nier tout ce qui viendra la remettre en question car cela nous remet alors, nous-mêmes, en question. Cette dépossession n’est pas ce à quoi nous prépare notre culture et notre éducation qui nous enseignent, dès le départ, à nous nous sentir possesseurs de la connaissance et à nous identifier à elle, ainsi qu’à nous mettre en concurrence avec autrui à ce propos.

    Amezeg

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    1. Dépossession... voilà bien le cœur du problème. Je songe en répons à Christian Bobin qui écrit: "L'art suprême, ce qui manque à tant de petits maîtres, c'est de savoir donner sa langue au chat" (Le Christ aux coquelicots)

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  7. J'ajouterai juste à tout ce qui a été dit, et qui est bien intéressant...que le serpent est aussi caractérisé par le fait qu'il "change de peau", qu'il mue...
    Dans un rêve, il indique donc les "mutations" (personnelles et collectives).

    Si le serpent fait aussi peur, c'est parce qu'il annonce une "mort"...et il ne devient "jeune homme lumineux" (donc rassurant) qu'au moment du "renouveau" qui suit la "nuit noire de l'âme"...

    Ce grand rêve ne parlerait-il pas des "grandes mutations spirituelles", mutations qui s'étalent sur des siècles et des millénaires... ?
    ...et auxquelles le destin du rêveur (apparemment une "vieille âme" déguisée en jeune homme...) parait inextricablement lié...

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    1. Merci pour cet apport. En effet, le fait que le serpent change de peau renvoie aux mutations. Dans le mythe de Gilgamesh, c'est le serpent qui s'empare de la plante qui confère la vie éternelle, et il symbolise dès lors ce qui perdure - la seule chose qui ne change pas: le changement. Mais c'est un symbole tellement complexe que je me garderai de le résumer à un seul aspect. Il fait peur parce qu'il est "mort", mais il est aussi "transgression", "force génératrice", etc.

      Ceci dit, je suis d'accord que ce rêve semble parler de mutations qui se déroulent sur des millénaires, d'où mon allusion au fait qu'il semble évoquer la réincarnation. Je trouve absolument fascinant que ce soit le Bouddha qui renaisse et qui meure tandis que le rêveur semble ne pas être affecté par le temps. C'est ce qui me fait penser que c'est le point de vue du Soi éternel qui s'exprime, en effet sans doute à propos de mutations spirituelles. Il me semble indiquer, avec une quatrième renaissance du Bouddha, que le parcours de cette vieille âme a maintenant atteint une forme de complétion dans l'Éternité.

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  8. « .... la seule chose qui ne change pas: le changement. » écris-tu, Jean.

    Cela rappelle, bien sûr, le Livre des transformations, le Yi King : "L’immuable c’est la transformation, la transformation c’est l’immuable."
    Et cela m’amène à méditer un peu le sens des images et symboles de ce rêve qui avait peut-être éveillé en moi quelques réflexions non formulées depuis que j’en ai lu ici le récit :

    Je suis tenté de rapprocher le mouvement de la rivière, coulant dans les deux sens, de l’ondulation qui est souvent le mouvement du serpent. C’est comme si la sinusoïde de cette ondulation correspondait au double sens du courant de la rivière, un courant en quelque sorte alternatif mais ininterrompu : de la source à l’embouchure et de l’embouchure à la source, du non-manifesté au manifesté et du manifesté au non-manifesté, courant exprimé tout aussi bien par la rivière que par le mouvement ondulatoire du grand serpent. Expression de la polarité d’une énergie primordiale, d’une grande vibration cosmique : cela est – cela n’est pas – cela est – cela n’est pas...

    Le tourbillon naissant de cette polarité conduirait l’homme qui y plonge et le traverse en s’incarnant vers CELA QUI EST SANS ÊTRE TOUT EN ÉTANT.
    Le rêveur pourrait donc, en tant qu’être humain qui s’incarne, nager dans ce tourbillon et "le traverser" tandis que le Bouddha, figurant peut-être, dans ce rêve particulier, la potentialité d’éveil naturellement associée dans l’au-delà mystérieux à l’âme individuelle, n’aurait pas cette possibilité aussi longtemps qu’ un être humain incarné ne lui a pas donné la possibilité de naître en ce monde à travers lui.

    L’arbre, dont les racines plongent dans la terre de l’incarnation et dont la ramure s’élève vers le ciel tandis que son tronc relie solidement ces deux pôles, pourrait ainsi représenter l’homme né en ce monde terrestre mais toujours relié à l’autre monde, l’homme à travers qui passerait l’énergie cosmique universelle, l’homme qui serait le point de passage et, en quelque sorte, l’accoucheur de cette énergie dans le monde tangible et limité de l’espace-temps. Cette énergie universelle passerait ainsi de l’obscurité de l’inconscient dans le domaine éclairé par la conscience : c’est l’éclairement de l’arbre-homme par les rayons de lumière qui semble motiver et permettre la sortie du serpent d’énergie colossale par l’ouverture située entre les racines et la ramure de l’arbre-homme. Entre le haut et le bas : cela rappelle, par exemple, la Voie du milieu enseignée par les sages taoïstes. Le rêve semble indiquer que le Bouddha qui naît au matin, dans la lumière, n’aura plus à renaître au fils des temps de la même façon que renaissaient les Bouddhas naissant dans l’obscurité ("inconsciente") du milieu de la nuit.

    Amezeg

    Commentaire 1/2 - à suivre...

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    1. Un grand merci, Amezeg, pour cet apport à la réflexion autour de ce rêve. J'étais moi-même fasciné par l'image de la rivière coulant à double sens, dans laquelle je voyais une représentation de la dualité de notre monde, mais je n'avais pas fait le rapprochement avec la sinuosité du mouvement du serpent, comme tu le dis "expression de la polarité d'une énergie primordiale, de la grande vibration cosmique".

      Je souligne particulièrement tes mots, qui me semblent toucher au cœur du rêve: "Le rêveur pourrait donc, en tant qu’être humain qui s’incarne, nager dans ce tourbillon et "le traverser" tandis que le Bouddha, figurant peut-être, dans ce rêve particulier, la potentialité d’éveil naturellement associée dans l’au-delà mystérieux à l’âme individuelle, n’aurait pas cette possibilité aussi longtemps qu’ un être humain incarné ne lui a pas donné la possibilité de naître en ce monde à travers lui." C'est un profond mystère qui est envisagé là, que Jung avait souligné déjà, dans lequel il ressort que le Soi, le Bouddha ou Dieu a besoin de nous pour naître en ce monde.

      Quant à ce que tu dis de l'arbre, volontiers symbole de l'individuation, j'y souscris entièrement - tu m'as donné envie de relire l'article sur l'arbre philosophique dans les Racines de la conscience. Finalement, donc, ce rêve porte une très bonne nouvelle, non seulement pour le rêveur mais peut-être plus largement: la conscience éveillée n'aura plus à renaître. C'est la Pierre Philosophale: enfin quelque chose de fixe et de durable est apparu, ce qui, selon Jung, est le but de la vie.

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  9. Commentaire 2/2

    Dans "Ma vie", au chapitre ‘Confrontation avec l’inconscient’, Jung déclare :
    « Ce n’est que lentement que je trouvai ce que signifie ce que signifie à proprement parler un mandala : « Formation — Transformation, voilà l’activité éternelle du sens éternel. » Le mandala exprime le Soi, la totalité de la personnalité qui, si tout va bien, est harmonieuse, mais qui ne tolère pas que l’on s’abuse soi-même...................... Je ne sais plus combien de mandalas j'ai dessinés à cette époque. En tout cas, beaucoup. Tandis que j'y travaillais, revenait inlassablement la question : « Où mène le processus dans lequel je me trouve? Quel en est le but? » Je savais par ma propre expérience que je n'étais pas de moi-même en état de choisir un but qui m'aurait semblé digne de confiance. J'avais fait l'expérience vivante que je devais totalement abandonner l'idée de la souveraineté du moi. C'est précisément en cela que j'avais subi un échec : je voulais continuer des recherches scientifiques sur les mythes, comme celles dont j'avais commencé l'élaboration dans les Métamorphoses et symboles de la libido ; tel était mon but. Mais il ne put en être question davantage. Je fus obligé de vivre moi-même le processus de l'inconscient. Il me fallut d'abord me laisser emporter par ce courant, sans que je pusse savoir où il me conduirait. Ce n'est que lorsque je commençai à peindre les mandalas que je vis que tout chemin qu'il me fallait aller et chaque pas qu'il me fallait accomplir, que tout convergeait vers un certain point, celui du milieu. Je compris toujours plus clairement que le mandala exprime le centre. Il est l'expression de tous les cheminements; il est sente qui mène vers le milieu, vers l'individuation. » C.G.Jung, "Ma vie", Éditions Gallimard

    Le rêveur forme un cercle en touchant sa hanche droite avec son bras droit et l’on peut être tenté de rapprocher ce cercle de l’image du trou dans l’arbre par lequel émerge et sort le grand serpent. Cela me suggère que le rêve invite R.A.Johnson à créer dans sa réalité humaine incarnée l’ouverture-mandala qui permettra au Soi de s’exprimer à travers elle/à travers lui, de le faire en conscience puisque le bras droit peut représenter l’action consciente (tandis que le bras gauche serait plutôt celui de l’action inconsciente). Cela confirmerait éventuellement que l’arbre du rêve représente le principe de l’incarnation humaine et que l’individuation serait, pour chaque individu, de vivre cette incarnation de façon unique, d’accomplir le destin unique qui est le sien.

    .................... ??

    Amezeg

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    1. Merci pour cette citation éclairante et pour l'interprétation que tu proposes. Toute la difficulté est bien d'assumer le caractère unique de ce destin, de cette individuation, hors donc de toute sécurité collective.

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  10. P.S. - Le cours des fleuves et des rivières sinue, serpente bien souvent à travers les terres traversées et l’eau qui s’écoule ainsi, dans leurs lits, représente une énergie considérable, parfois très dangereuse..

    Amezeg

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    1. Bonsoir, je viens de lire ce rêve sur le Bouddha et le serpent.
      J'ai fait également un rêve du même genre.
      J'étais à la campagne proche d'une forêt, je me suis approcher de ce bois
      pour me protéger de la pluie. Je me suis assis au pied d'un arbre. Et peu après j'ai senti que ça grouillait sur ma tête, je tiens a vous signaler que j’étais allongé dans mon lit, les yeux fermés et je m’apprêtais à m'endormir mais conscient. J'ai cru que j'avais des serpents sur ma tête, j'ai mis donc mes mains sur mon cuir chevelu pour vérifié, en me frottant. Puis le rêve débuta il se mis a pleuvoir très fortement, j'étais adossé à l'arbre et tout d'un coup j'ai vu une ombre sur ma tête très imposante qui me protégea de la pluie et servi de gouttière pour la pluie et je vis la pluie coulé et la ce qui est étonnant je me suis senti protégé malgré l'inquiétude d'avant . Et puis j'ai senti un être venir se protéger contre moi je ne peut vous dire qui c'était si c'était un être humain ou" autre" c'était une sensation. Le matin a mon réveille j'étais surpris et intrigué je me suis renseigné sur le bouddha et je découvris l’histoire de cette protection du serpent aux 7 têtes.Vraiment très surprenant que je rêve l'histoire du bouddha;Je tiens à vous signaler qu'il m'est très souvent arriver des rêves très surprenant.Pouvez vous me donner quelques explications sur ce rêve.
      Merci.
      Marc

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    2. Il est difficile de vous répondre précisément sans information sur ce qui vous préoccupait dans les jours qui ont précédé le rêve - sans vous connaitre mieux, je dois m'en tenir à des généralités. Le premier point, c'est que l'histoire du Bouddha est universelle, archétypique, et il n'y a pas besoin d'être bouddhiste pour rencontrer cet archétype dans les rêves. Le fait que vous vous asseyez sous un arbre est caractéristique justement de cette histoire: c'est en décidant de s'assoir au pied d'un arbre et de n'en plus bouger jusqu'à ce qu'il ait trouvé l'illumination que le Bouddha a connu l'Éveil. Le rêve pourrait vous suggérer par là une attitude devant les difficultés de l'existence - la pluie représente volontiers les émotions qui nous tombent dessus, et pour vous protéger de celles-ci, le rêve semble vous inviter à prendre un temps d'arrêt à l'écoute de ce qui se passe en vous. Il y a peut-être dans ce rêve quelque chose de compensatoire d'une difficulté dans laquelle vous aviez, au moment du rêve, l'impression de n'avoir aucun soutien de l'extérieur, et il vous propose une piste de solution pour composer avec cette difficulté.

      Vous êtes dans la nature, c'est-à-dire semble-t-il que vous êtes en contact avec votre propre nature. Vous êtes seul, ce qui donne à penser que c'est dans la solitude que vous trouverez des réponses à vos questionnements, ou que vous êtes quelqu'un qui vit une grande solitude et que vous pouvez y trouver une grande valeur. Vous vous rapprochez du bois pour trouver un abri, ce qui laisse entendre que pour trouver un abri, vous vous rapprochez de l'inconscient (le bois). En d'autres termes, ce n'est pas en cherchant des solutions à l'extérieur à ce qui pouvait vous préoccuper au moment du rêve que vous trouverez une paix intérieure mais en écoutant ce qui se passe à l'intérieur de vous. Alors, il y a une inquiétude qui se manifeste, que symbolise cette impression d'avoir des serpents sur la tête, un peu comme si vos cheveux se confondaient avec de serpents - les cheveux symbolisent volontiers les idées et les fantasmes qui nous passent par la tête. Et c'est à ce moment que vous avez senti cette protection que vous donne le grand serpent qui accompagne le Bouddha - cela semble dire que, quelle que soit ce qui vous inquiétait, vous pouvez compter sur la protection de l'inconscient, et qu'au travers de cette inquiétude, vous entrez en contact avec quelque chose de plus grand que vous qui vous assure de sa protection. Le fait, comme vous le dites, que vous fassiez souvent des rêves très surprenant, semble indiquer qu'il y a là quelque chose qui cherche à attirer votre attention...

      J'espère que ce que je dis là peut vous éclairer un peu mais donc, si vous voulez que nous discutions plus en détail de ce rêve, vous pouvez me contacter via le formulaire de contact de ce blogue.

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  11. ce reve est spectaculaire pour provoquer le reveur mais il est surtout tres nostalgique, c'est l'amour perdu entre le moi et le soi. Il traite aussi de l'impermanence et de l'attachement. C''est bien un reve qui appelle le reveur a prendre le chemin sprirituel mais ce n'est pas un grand reve a mon sens, ce n'est pas un reve de realisation comme celui du Boudha lui meme qui reve que son corps s'etend sur le monde et qui annonce son regne. Les 1000 ans symbolisent sans doute aussi que l'aligenement entre le moi et le soi n'est pas aussi simple qu'on peut l'imaginer, que c'est un phenomene rare et surtout precaire quand il nait dans la nuit, c'est a dire inconsciemment, c'est a dire qu'il existe des gens qui s'eveille subitement, par surprise, dans la nuit de leur Moi.

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  12. Jean, les reves c est tres interessant mais est ce que cela conduit a la cessation de la souffrance ? a la fin de la soif, du desir d insatisfaction ? car le bouddha n a pas enseigne l etude des reves et je me demande si ce n est pas Plutot un moyen de renforcer cette soif par la decouverte sans fin des reves...d autre part Me peut on pas dire que le bouddha etait plus eveille que jesus et jung qui semblait toujours lutter contre quelques adversaires invisibles de leur humanite...

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    1. Merci Nexus, c'est une excellente question. Non, le travail des rêves en soi ne conduit pas à la cessation de la souffrance, mais cela peut être un élément de la discipline (parmi d'autres, dont la méditation, le yoga, le service...) qui y conduit. Je vous invite à visiter le site du Yoga Psychologique (www.yogapsy.org) élaboré par mon mentor Nicolas Bornemisza et qui envisage les rêves dans cette perspective. Mais en effet, si l'interprétation des rêves est un outil qui peut permettre de "vider l'inconscient", tout dépend cependant de ce qu'on cherche en utilisant cet outil, de l'usage qu'on en fait - au service de quelle intention il est finalement mis. S'il est mis au service de la soif, il la renforcera jusqu'à un certain point...

      Par ailleurs, je ne comparerai pas Jung à Jésus et Bouddha, car il n'a jamais prétendu à leur degré d'accomplissement, et je ne dirai pas non plus l'un serait plus "éveillé" que l'autre. Jésus et Bouddha incarnent chacun une facette de la réalisation et ils me semblent complémentaires. Enfin, je crois que c'est seulement dans la tradition canonique obsédée par le péché que Jésus semble toujours se battre contre quelques "adversaires invisibles". Je vous invite à lire l'Évangile de Thomas, dont les paroles ont échappé à la réécriture par l'Église : vous y verrez que l'enseignement originel du Christ n'a que peu à voir avec le "cinéma" qu'on en a fait bien avant Hollywood...

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    2. Merci Jean, je ne sais plus ce que je cherche en etudiant mes reves a vrai dire, au debut je voulais juste voir d'autres horizons mais mes reves sont plutot tres terre a terre en general. Je me demande aussi si cela permet d'aquerir certains pouvoirs paranormaux et si j'etudie encore mes reves c'est finalement plus pour savoir si il y a une finalité a tout ca..

      Si l'etude de l'inconscient renforce la soif on peut alors parler d'une voie demoniaque a mon avis et donc pour moi d'une voie secondaire...

      Je pense que malgré tout le Bouddha etait superieur parce qu'il a dit avoir vu les mondes superieurs et inferieurs grace a la meditation et peut etre aussi, c'est mon avis, dans une EMI quand il etait ascete et sur le point de mourir avant de se reprendre et de remanger...simnplement il aurait compris que toutes ses recherches sur l'inconscient, l'univers n'avaient eté animé que par la soif, soif qui est alors devenu son principal probleme sous l'arbre.

      On peut effectivement douter de la version offcielle du Christ mais c'est celle que l'inconscient collectif a retenue et donc pour moi la vraie au sens populaire du terme evidemment... et il est question d'un Christ qui se positionne lui meme comme le Fils, c'est a dire inferieur au Pere et malheureusement cela veut dire inferieur au Mental finalement alors que le Bouddha lui a tout rejeté car il a vu qu'il etait lui meme la Source, le Pere de toute chose.
      Je dois dire que je n'etais pas un grand fan du Bouddha mais la fin de la souffrance me semble etre aujoudhui la seule motivation qui pousse les hommes a encore chercher et Nietzsxhe avait beau dire que son " Bonheur avait le temps " je crois que c'est malgré tout ce qu'il cerchait sans pouvoir se l'avouer. Le masochisme n'est pas une fin en soi.

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    3. Ce n'est pas que l'étude de l'inconscient renforce la soif, c'est que comme tout outil, tout dépend avec quelle intention on s'y intéresse. Par exemple, si on s'intéresse aux rêves avec une volonté de puissance, cela ne conduit pas à la libération. Ce n'est pas que les rêves soient une "voie démoniaque", c'est simplement qu'on s'en sert à des fins "démoniaques". Par exemple, rechercher des pouvoir paranormaux dans les rêves (ou ailleurs), cela ne va pas dans le sens d'une libération de la souffrance.

      Je repensais à votre question et je dois ajouter que l'intérêt de l'étude des rêves, c'est qu'elle nous permet de comprendre comment fonctionne le mental, c'est-à-dire le mécanisme qui crée l'illusion. Je vous renvoie au yoga sutras de Patanjali, 1-38 : "on peut y arriver (à la libération) par l'étude du sommeil et du rêve".

      Vous savez sans doute que les rêves ont une dimension compensatoire : si vous faites des rêves "terre à terre", il est probable que l'inconscient vous invite à prêter plus attention à la terre...

      Je ne vois aucun intérêt à discuter de la "supériorité" des uns ou des autres car je ne raisonne pas dans ces termes de supériorité et d'infériorité, qui me semblent projectifs. Il vaut bien mieux selon moi s'occuper de nos propres tendances à nous supérioriser / inférioriser que de débattre de la supériorité supposée des uns ou des autres.

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    4. C'est justement la question que je me pose : quel est la veritable raison qui fait que les gens et moi meme nous interessons aux reves ? pour moi meme c'est la volonté de puissance je crois et je l'avoue : etre et avoir plus ! mais que puis y faire ? mon mental est ainsi...

      C'est vrai que rechercher des pouvoirs ca ne va surement pas dans le sens d'une liberation de la souffrance il est surement plus simple de mediter tranquillement et de pacifier son mental.

      En ce qui concerne la nature de l'illusion et du mental les choses sont trop compliques pour moi, comme je le dis souvent il me faudrait un super mental pour comprendre rellement de quoi je parle, bien souvent je parle sans meme savoir de quoi vraiment je parle vraiment.

      Oui on dit que les reves sont compensatoires mais est une verité absolue ? mais c'est vrai que jai toujours eté tres spirituel, ceci pourrait expliquer cela.

      Concernant le sujet de la superiorité ou pas c'est notre propre point de vue qui parle bien sur, le point de vue de notre mental qui est tel que la Nature a bien voulu nous le donner. Un mental avec des points de vue toujours personnels et qui servent a nourrir notre ego.

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  13. je comprends que le sujet puisse sembler superficiel et on ne peut nier le fait que Jung etait surtout destiné a devenir Jung et le Bouddha le Bouddha mais je ne peux imaginer que Jung etait plus realisé que le Bouddha, realisé en terme de connaissances et de sagesse. Encore une fois mon esprit est dualiste, je ne peux le nier.

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  14. par ex je sais bien que Jung a joué un role important dans la psychologie et que le Bouddha joué un role important dans la spiritualité on va dire et que tout le monde joue un role important a son niveau mais quelque chose en moi resiste, persiste et signe pour dire que seul le bouddha savait, je veux dire vraiment. Je ne sais pas, c'est peut etre qu'on a peint le psersonnage de lameilleur maniere qui soit et pourtant c'est bien ce que l'inconscient collectif semble avoir retenu et dire et que l'on ose pas vraiment s'avouer : l" e plus sage des tous les sages est bien le Bouddha ".

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  15. moi meme pour se sentir au niveau du bouddha je me dis parfois qu'il me faudrait pulveriser mon propre esprit comme si seule la pulverisation etait necessaire et cette maniere de penser me pose un probleme car je suis entre 2 eaux : celle de Jung et celle du Bouddha { le christ je n'en parle meme pas, la croix fut son tombeau pour moi } et que je sent que je dois choisir et laisser 1 pour ne garder que l'autre. J'ai longtemps cru qu'on pouvait etre des 2 mais je doute de plus en plus...

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  16. vous savez je dis ca parce que je ne veux pas avoir l'impression d'avoir raté quelque chose et j'ai l'impression meme si j'aime ca que les reves ne me menent nul part vraiment, je veux dire que la spritualité qui ne mene pas as la realisation maximum ne sert a rien. Je veux pouvoir me reveiller un jour et etre heureux et peu importe les circonstances materielles.

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  17. - je suis garagiste, un client veut changer les serrures de securité de sa voiture soit 4 ou 6 au total soit 500 chacune, il est pret a me donner 35000. Comme je ne connais rien je demande conseil a un autre homme qui me montre qu'il faut juste ouvrir une plaque carré a chaque porte. Je trouve le prix exagéré et veut lui prendre 350 pour chaque porte. Finalement je retourne a ma voiture mais ma voiture n'est plus la, je me réveil...

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