Le renouveau, quand il montre le bout de son nez dans les rêves, apparait souvent comme un enfant. Il arrive qu’il démontre des capacités un peu extraordinaires qui attirent l’attention. Par exemple, c’est un bébé de quelques mois qui parle avec beaucoup de sagesse, ou c’est un jeune enfant qui d’une main tendue tire le rêveur de la rivière où il était en train de perdre pied. Quand il y a de telles caractéristiques hors du commun, on sait qu’on est en présence d’un archétype. Ici, c’est bien sûr de l’Enfant Divin dont il est question. Et ce n’est évidemment pas un hasard si le solstice d’hiver est associé dans notre culture avec Noël, la célébration par excellence de l’Enfant Divin.
Il est logique que l’enfant symbolise le début
d’un nouveau cycle, une nouvelle impulsion de vie. En regard d’un monde en voie
d’épuisement, l’Enfant Divin apparait volontiers comme le Sauveur, et pourquoi
pas ? Il nous rappelle que toute situation recèle des capacités
créatrices, des possibilités de renouveau, et finalement que tout change, que
l’impermanence est la seule loi. Cet enfant merveilleux souligne aussi le fait
qui veut que le tout-petit pacifique et vulnérable l’emporte finalement sur la
force et le pouvoir, comme l’enfant Jésus sur le roi Hérode. Dans de nombreux
contes, c’est de l’enfant innocent – étymologiquement : qui ne nuit pas –
que vient la solution. Pour Jung, il y a là aussi une allusion à la
« fonction inférieure » de la conscience, c’est-à-dire que le
renouveau vient de ce qui en nous est le moins développé, le plus immature et
par là-même, le plus proche de l’inconscient.
Le meilleur usage que nous puissions faire des
projections, c’est de les utiliser comme des reflets dans le miroir que nous
tend la réalité. Dans tout enfant, il y a quelque chose de vraiment divin qui
tient à la fraicheur du nouveau, à l’émergence du non-conditionné. L’enfant
nait de deux parents, de deux histoires qui se mêlent comme des rivières, dans
un certain contexte qui est celui de son époque, de la culture, de la société
dans lesquelles il apparait, et cependant il est plus que le produit de tous
ces facteurs. Il apporte quelque chose de nouveau, qui lui est propre et qui
est absolument unique, sa propre petite note dans le grand concert de
l’Univers. Finalement, l’enfant incarne le processus créateur dont émerge sans
cesse la réalité de ce que nous appelons le monde : d’instant en instant,
un moment présent toujours neuf, qui n’est la copie d’aucun autre moment.
Nous-mêmes, nous sommes aussi d’instant en instant toujours neufs, non conditionnés
dans notre nature essentielle par notre passé ou par quoi que ce soit ;
nous oublions trop souvent que nous nous recréons sans trêve.
Quand l’Enfant Divin vient nous visiter dans
nos rêves, il nous rappelle que nous portons en nous-mêmes cette capacité
créatrice d’un renouveau salvateur. Il nous invite à « redevenir comme de
tout-petits enfants ». Il ne s’agit pas là de laisser ressortir ce que
nous avons de dépendances infantiles mais simplement de revenir à notre
innocence première et de porter un regard neuf sur tout ce qui nous entoure
ainsi que sur nous-mêmes. La conscience est en elle-même toujours neuve,
fraiche et non-conditionnée, tout comme l’instant présent. Lorsque l’enfant
apparait, c’est que nous sommes prêt à reconnaitre que l’empereur est nu ;
tout ce dont nous habillons la réalité est en voie de dissolution,
d’effondrement, pour laisser la place à la simple vérité. Elle arrive sans
tambour ni trompette, ou alors ce sont les instruments d’une joyeuse fanfare.
C’est un éclat de rire, la joie soudaine d’être, un relâchement des tensions du
corps et de l’âme qui se baignent enfin dans la fraicheur toujours renouvelée
de la vie. Ah, quelle merveille, tout est toujours nouveau !
Je vous invite à regarder la vidéo ci-dessous comme une illustration quasi-onirique de cette réflexion sur l'omniprésence du nouveau. Elle a été réalisée en 1971 par James Broughton, un poète et réalisateur d'avant-garde qui faisait des films pour «voir de quoi [ses] rêves auraient l'air. » Cette séquence, qui illustre (en anglais) un de ses poèmes les plus fameux - This is It -, se regarde en effet comme un rêve où l'on revisite le jardin d'Éden en compagnie de l'Enfant Divin et d'une balle qui pourrait bien représenter le Soi, si l'on veut encore s'encombrer de concepts pour désigner Cela.
Voici ma traduction du poème avec le texte original, qui s'écoute ici comme une comptine - même si vous ne comprenez pas la langue de Shakespeare, vous en saisirez facilement l'essentiel:
This is It This is really It. This is all there is. And it’s perfect as It is. There is nowhere to go but Here. There is nothing here but Now. There is nothing now but This. And this is It. This is really It. This is all there is. And It’s perfect as It is. This is It and I am It and You are It and so is That and He is It and She is It and It is It and That is That O it is This and it is Thus and it is Them and it is Us and it is Now and Here It is and Here We are so This is It |
Ceci est Cela Ceci est vraiment Cela C'est tout ce qu'il y a Et c'est parfait tel que c'est. Il n'y a nulle part où aller seulement Ici. Il n'y a rien ici seulement Maintenant. Il n'y a rien maintenant seulement Cela. Et ceci est Cela Ceci est vraiment Cela C'est tout ce qu'il y a Et c'est parfait tel que c'est. Ceci est Cela et je suis Cela et tu es Cela et ainsi est-ce Cela et Il est Cela et Elle est Cela et Cela est Cela et Ceci est Ceci O c'est Ceci et cela l'est donc et c'est Eux et c'est Nous et c'est Maintenant et cela est Ici et Nous sommes Ici alors Ceci est Cela. |
Salut Jean,
RépondreEffacerAprès mon commentaire que j'ai poster hier, j'ai rêvé de mon plus jeune enfant qui enfante lui-même encourager par sa mère. Le rêve est plus long mais cette scène est encore en phase avec le thème du renouveau. Le renouveau qui se renouvelle...
À bientôt !